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TRASHMOVIES
13 septembre 2006

TAXIDERMIE

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Pur ovni cinématographique sorti de nulle part, Taxidermie représente l’archétype parfait du film à sketches, scindé en trois parties distinctes pouvant a priori être abordées indépendamment les unes des autres, mais imposant a posteriori leur interdépendance de par la résonance toute particulière que chacune exerce sur les deux autres. En brossant le portrait naturaliste de trois hommes d’une même famille (respectivement le grand-père, le père et le fils), le cinéaste hongrois György Pálfi accouche d’une trilogie intègre et totalement lucide quant à l’avenir de l’homme, dont le destin ne dépend pas seulement de ses propres actes, mais aussi des expériences de ses ancêtres.

Véritable choc des générations, chacune régie par le mode de vie du protagoniste principal (le grand-père est soldat, le père champion de bouffe sportive et le fils taxidermiste) et par le contexte socio-culturel de son époque (respectivement la seconde guerre mondiale, la montée du communisme, la Hongrie contemporaine), Taxidermie forme un tout parfaitement cohérent, imposant la vie du grand-père comme étape fondatrice des bases familiales (la castration de la hiérarchie militaire interdisant toute initiative qui se solderait par la mort, l’existence unidirectionnelle à l’avenir déjà tout tracé, sans bonheur et sans prestige, la fascination morbide du sexe et de la mort), celle du père l’étape d’ascension vers la renommée (toujours bridée par une hiérarchie, où le coach impose ses règles drastiques) et celle du fils transcendant les deux premières dans une sorte de synthèse perspicace où la déchéance sociale accompagne la déstructuration de la cellule familiale, où toute lueur d’espoir se réduit à son simple état d’espérance et où la destruction des acquis les plus profonds ne peut passer que par la mort. De pantin désarticulé au service d’instances supérieures, le protagoniste passe à l’état d’entité autonome, résultat d’une fracture psychologique et émotionnelle qui aboutira à la béatification absolue de son être présent (lui-même) et passé (ses parents) par le biais d’une fièvre créatrice et macabre où le corps prend finalement le pas sur l’esprit.

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Pessimiste de bout en bout (sentiment accentué par la magnifique photographie de Gergely Pohárnok), Taxidermie surprend par ses traits d’humour tristes, inattendus mais jamais inopportuns, ou encore par l’incursion de séquences flirtant avec le fantastique (le rêve de Morosgoványi). Dommage tout de même que, si le film de Pálfi possède de nombreuses qualités formelles (celles déjà évoquée ci-dessus, mais aussi de vertigineux et impressionnant travellings circulaires symbolisant le passage du temps, il faut le voir pour le croire), celui-ci souffre d’un déséquilibre flagrant dans sa narration (la seconde partie est la moins intéressante et la moins rythmée) altérant parfois sa progression au détriment de son intérêt.


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